Quand on demandait a oscar wilde:
“etes-vous anglais?”
- non, le contraire, irlandais et poete.

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Oh! Messieurs, c’est peut-être uniquement parce que je n’ai jamais rien pu commencer ni achever, que je me crois intelligent.
(Dostoïevski: Mémoires écrits dans un souterrain)

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Pleure et ne te console pas. Pleure et plus tard la paix viendra.
(Dit à Dostoïevski après la mort de son fils)

La Mort Noire

Il s’écoula plus d’une semaine avant que les pathologistes ne découvrent la cause du décès d’Amado Ortega. Un électrocardiogramme n’avait fourni aucun élément utile. Mais le praticien qui s’occupa de ce patient remarqua, lui, un symptôme inhabituel qu’il nota. Même placé sous oxygène, les lunules et les lèvres ont conservé une coloration cyanotique foncée”. Pour être exact, elles avaient la couleur de la Mort Noire. Une culture fut alors réalisée sur des tissus prélevés sur un des poumons de M. Ortega. Là, un bactériologiste qui les étudiait à l’aide d’un microscope puissant vit de petites tiges bipolaires que l’on appelle pastuerella pestis. Aucun organisme n’a eu d’impact plus grand sur les civilisations occidentales. Et aucun, à l’exception du choléra, n’a tué autant d’hommes.
Les scandinaves personnifiaient la peste bubonique sous les traits de la déesse Hel, vieille sorcière qui nettoyait avec son balai la campagne de toute forme de vie. Ce fut le sujet de ce chef-d'œuvre de Bruegel à vous glacer le sang appelé l’Empereur. Les bateaux remplis d’épices ramenèrent pastuerella pestis à Gênes en 1348. On dénombra plus de 42 800 000 morts lors de cette enquête et les historiens estiment que la population de l’Europe fut réduite du tiers par cette pandémie qui dura 5 ans. L’épidémie devait se déclencher à nouveau à de nombreuses reprises pendant 5 siècles.
Et voilà que cette même peste mortelle circulait maintenant dans le haut pays du nord du Mexique.
La peste bubonique fut pour la première fois détectée au Nouveau-Mexique en 1938, quand elle entraîna une hécatombe de rongeurs de la prairie. Le premier cas humain fut enregistré en 1949, rapidement suivi de 4 autres. Le biologiste Bryan E. Miller, qui à l’époque travaillait sur le terrain pour le Service de la santé U.S., fut dépêché sur place en 1950 et passa 2 ans à contrôler des foyers connus de l’épidémie et à en découvrir de nouveaux. Il trouva de semblables points de départ de la maladie dans 22 des 32 comtés du Nouveau-Mexique.
La maladie avait ensuite connu un reflux dans l’Etat, tout comme elle l’a fait selon sa mystérieuse manière, tout au long des annales de l’histoire. Des cas isolés surgirent en Californie, dans l’Orégon, l’Idaho, le Nevada et l’Utah, mais au Nouveau-Mexique elle sembla latente jusqu’en 1959. Le nom du village où résidait Amado Ortega suffit à Miller pour apprendre qu’il allait avoir grand besoin d’être secondé par une chance du même ordre. Pecos, village de 600 habitants, est bâti à l’embouchure du Canyon du Pecos, l’accès le plus fréquenté pour se rendre sur la Réserve sauvage de Pecos. En aval s’étendent des centaines de milliers d’hectares de montagnes, de lacs et de rivières à truites. Plusieurs milliers de campeurs, de pêcheurs, de pique-niqueurs s’engouffrent par le village chaque année. Si une épizootie de peste causait une hécatombe chez les rongeurs dans une zone battue par ces visiteurs... les enfants adorent pourchasser les tamias, écureuils etc.
C’était à très exactement ce qui s’était produit dans l’un des cas précédents. Un enfant avait capturé un chien de prairie près du village de Glorieta et la maladie avait été mortellement inoculée par une piqûre de puce. Si les enfants des touristes étaient infectés de la sorte, ils seraient vraisemblablement, une fois rentrés chez eux, dispersés dans tous les horizons avant que la période d’incubation de pastuerella pestis, qui dure de 2 à 5 jours, n’atteigne son terme et que les premiers symptômes de la maladie n’apparaissent. Ces derniers ne seraient probablement pas reconnus par les docteurs du nord de l’Etat dont l’attention n’avait pas été appelée sur la présence de la maladie. Il y a peu de chance pour qu’un médecin qui n’a pas été alerté et qui, tout au long de sa carrière, n’a jamais vu ni entendu parler d’un cas de peste puisse atteindre le bon diagnostic en observant les premiers symptômes. Ils ressemblent à ceux d’une multitude d’affections courantes. Pastuerella pestis se propage par division d’une seule cellule en deux, multipliant son nombre par deux toutes les vingt minutes. A ce taux de rapidité, une tige donne 68 millions de tiges en douze heures. Lorsque ces tiges meurent, elles produisent une toxine qui détruit les parois des vaisseaux sanguins. Ainsi, dans les dernières étapes du mal, le traitement qui détruit les bacilles soumet le patient à un déferlement massif de toxine empoisonnée.
Les biologistes réalisèrent sur le terrain l’autopsie des rongeurs qu’ils attrapaient, repérant les puces et la rate des animaux. C’est alors que Miller préleva la rate d’un écureuil à pelage doré et découvrit sur ce minuscule organe un schéma irrégulier de points sombres, ce genre de taches qui pouvaient être dues à la destruction des parois des vaisseaux sanguins. La tularémie peut produire ce genre de pigmentation foncée. D’autres maladies également. La toxine du bacille de la Mort Noire le peut assurément puisque ce sont les plaques noires sur la peau des mourants qui constituent cette signature caractéristique qui a valu son nom familier à la maladie.
Aujourd’hui les enfants ne savent pas qu’un anneau de fleurs de romarin et une poche remplie de pétales aromatiques constituaient une autre de ces prescriptions désespérées destinées à se prémunir contre la Mort Noire intraitable. Mais la Mort Noire est toujours là dans les montagnes.

L’Homme de Folsom

La première fois que l’homme était apparu sur cette crête déserte remontait à plusieurs jours. Il s’agissait d’un personnage bronzé, grand et maigre, qui se déplaçait lentement sur les versants du Llano d’Albuquerque, cette grande masse de terre désertique qui se dresse entre le Rio Grande et le Rio Puerco dans la région nord et centrale du Nouveau-Mexique.
Quand il reparut sur la crête dans un pick-up truck, il apporta de la nourriture et de l’eau, une brouette, une pelle et un cadre de tamis en bois muni d’un treillis métallique dont les mailles faisaient cinq millimètres. Non loin de ces collines érigées par les fourmis il commença à creuser, prélevant des échantillons puis allant un peu plus loin. Il creusait avec précautions, tamisant la terre avec son écran métallique. Le deuxième jour il découvrit exactement ce qu’il espérait.
Le fer de sa pelle fit apparaître une feuille de silex aplatie. L’extrémité était cassée mais il en restait suffisamment pour montrer qu’elle avait été taillée par une main humaine, affûtée avec soin et habilement cannelée. En réalité, il s’était agi d’une arme qui avait été conçue spécifiquement dans le but de tuer un animal de grande taille qui avait cessé d’exister cent siècles avant que l’Amérique ne soit “découverte”. Pour l’homme à la pelle, Jerry Dawson, un étudiant chargé de travaux dirigés au sein du Département d’anthropologie de l’université du Nouveau-Mexique, spécialiste du “Premier Homme”, l’arme cassée constituait la confirmation de ce que les fragments de silex lui avaient suggéré. Dawson venait de trouver la piste d’un mystérieux chasseur de l’âge de la pierre qui avait poursuivi les bisons à longues cornes à une ère où les murailles de neige gelée frigorifiaient encore l’Ouest américain. La pelle de Dawson avait traversé dix mille ans et révélé au grand jour le camp de chasse de l’Homme de Folsom.
Notre continent était plus frais et plus humide à l’époque où le chasseur dénoua la lanière, a l’extrémité de sa sagaie, et laissa tomber en cet endroit sa pointe brisée. Il s’habillait de peaux de bêtes. La pointe pouvait signifier que l’homme, ainsi que la femme qu’il avait prise avec lui, s’étaient couchés ce soir-là avec le ventre creux. Elle nous apprend que la lame du chasseur avait manqué sa cible et frappé le sol pierreux. S’il manquait souvent sa cible il ne pouvait continuer à vivre. La faim le rendait trop faible pour éviter les cornes de quinze centimètres d’envergure de l’imposant bison de Taylor lorsque celui-ci chargeait. Quand il était faible, les autres prédateurs venaient se jeter sur lui, et l’homme n’était qu’un prédateur carnivore parmi quantité d’autres. L’époque que la science désigne sous le nom de “pléistocène” engendra dans l’ouest de l’Amérique trois espèces de jaguar. Pire encore il y avait les loups préhistoriques, des tueurs d’une taille monstrueuse que la science moderne qualifierait, avec sa simplicité descriptive, de “loup terrible”.
Les anthropologues connaissent ses voyages grâce aux sites où il tuait, ensevelis sous des éternités de terre et de limon, en divers points du versant est des montagnes Rocheuses. En se basant sur ces sites, ils savent comment il tuait, dépeçait et découpait ses proies, comment il fabriquait ses armes, et ils connaissent certains éléments concernant ses techniques et ruses de chasseur.
Nous pouvons supposer qu’il s’agissait d’un homme d’une taille imposante puisque l’ère glaciaire avait tendance à exagérer la taille des animaux qu’elle engendrait, puisque son frère européen, l’Homme de Cro-Magnon, était un solide individu, et puisque la manière qu’il avait adoptée pour survivre sur une planète hostile exigeait une force énorme. Nous pouvons également supposer qu’il était doté de ces “replis d’estomac” communs aux membres des tribus aborigènes adeptes de la chasse qui se gorgent quand ils parviennent à tuer une proie et résistent à la disette dans le cas contraire. Enfin, on peut penser qu’il avait cette “tête allongée” au crâne étroit que l’on rencontre encore parfois chez l’homme moderne.
Mais ce ne sont là qu’hypothèses car nul fragment de son squelette n’a jamais été retrouvé. Pour une raison difficile à expliquer, les anthropologues qui révèlent au jour les champs d’ossements des grands mammifères qu’il tuait ne parviennent pas à découvrir ne serait-ce qu’une dent ayant appartenu au grand chasseur qui faisait passer ces bêtes de vie à trépas.
L’homme qui campait sur le versant de cette crête décidait probablement de lui-même quand sa vie devait prendre fin.... et s’exposait lui-même délibérément à la mort. Quand il atteignait un âge avancé, cet âge arrivait à trente-cinq ou quarante ans), il abandonnait la bande de chasseurs à laquelle il appartenait et allait se faire tuer et dévorer par les loups. Les Masaïs, au Kenya, et certaines tribus primitives d’Esquimaux pratiquent encore de nos jours cette horrible forme de suicide quand ils ne peuvent plus rien apporter à la communauté. On ne retrouve pas d’ossements de Masaïs parce que les hyènes succèdent aux lions et détruisent les squelettes. Les chiens mangeurs d’ossements de l’ère glaciaire auraient de la sorte succédé aux machairodontes et aux loups préhistoriques.
Mais s’il ne reste aucune trace de l’Homme de Folsom lui-même, ses itinéraires de chasse sont parsemés d’indices nous apprenant qui il était. Nous savons qu’il utilisait un os de bison pour tailler un disque plat et qu’il taillait des encoches sur son pourtour. Nous savons que ses outils avaient tendance à être plus petits et bien mieux finis que la coutume ne l’imposait chez les hommes de l’âge de la pierre. Nous savons qu’il avait recours au feu pour déclencher la fuite éperdue du gibier, nous connaissons sa manière de fabriquer ses armes et de les utiliser. Mais pour chaque nouveau fait établi, une douzaine de questions surgissent. Pourquoi sculptait-il ce disque? Pourquoi concevait-il une pointe de sagaie dotée de caractéristiques qui défient le sens commun? Pourquoi passait-il si longtemps à mettre autant de beauté dans une arme qui n’avait pas une durée de vie supérieure à celle d’une balle de fusil? Pourquoi continua-t-il à fabriquer cette pointe de sagaie selon le même schéma complexe et difficile pendant une période couvrant mille années et cinquante générations d’hommes? Et plus que tout, pourquoi le jour est-il venu, il y a presque dix mille ans, où les pointes de sagaies cessèrent d’être abandonnées par terre sur les lieux des campements et laissées, intactes, au milieu des os de bisons? Pourquoi l’homme qui, à une époque, campa sur le Llano d’Albuquerque disparut-il de la surface de la terre?
Dawson s’était vu confier un travail de fouilles sur le terrain, d’un site nommé “site du Rio Grande”.
Au sommet de la crête, me dit-il, les sentinelles du campement devaient s’accroupir pour surveiller les milliers d’hectares de prairie ondulée à l’affût des troupeaux de bisons. Ils détachaient du manche des sagaies la base des pointes qui s’étaient brisées lors de leur dernière expédition et les remplaçaient par de nouvelles pointes. Dawson avait trouvé la base des pièces cassées là où elles étaient tombés sur le sol, mais il n’avait pas trouvé d’extrémités brisées, ce qui aurait été le cas si les pointes avaient été abîmées sur place durant leur fabrication. Dans la même zone il avait découvert d’importants éclats de silex, le genre de fragments qui pouvaient se détacher par martèlement en dégrossissant des blocs de roche de taille supérieure afin d’obtenir un matériau “vierge” prêt pour l’affûtage et la finition.
Curieusement, les petits racloirs de peaux en silex que les archéologues s’attendaient à trouver sur les lieux du campement de l’Homme de Folsom étaient absents ainsi que les minuscules fragments qu’il faisait lors de la finition méticuleuse de ses armes.
- J’ai fini par commencer à trouver quelques-uns de ces éclats obtenus par pression. Nous avons trouvé cet endroit parce que nous avons eu de la chance.
Il plongea sa main dans sa poche de chemise, en sortit un morceau de silex rose en forme de feuille qui pouvait avoir cinq centimètres de long, me le tendit. Pratiquement tout ce qui caractérise cette pièce est différent du travail des autres hommes de l’âge de la pierre et, à quelques exceptions près, il fabriquait toujours ses pointes comme ça: même forme, même taille, mêmes caractéristiques.
Le silex avait été aplati jusqu’à n’avoir plus que cinq millimètres d’épaisseur par quelque chose qui avait laissé des cannelures parallèles à la surface de la pierre. Une longue cavité qui s’étendait presque jusqu’à la pointe avait été arrachée à chaque face, semblable aux rainures que l’on fait pour l’écoulement du sang dans les baïonnettes de l’époque moderne. La base était légèrement concave, avec une saillie de pierre qui dépassait de chaque côté. La pointe comme les bords avaient acquis un tranchant comparable à celui d’un couteau par séparation successive de minuscules éclats.
- On peut dire que cette pointe représente la solution d’un problème, reprit Dawson. Il lui fallait un moyen de tuer le bison à longues cornes qui était plus rapide que lui, drôlement coriace et probablement tout ce qu’il y a de dangereux pour un homme qui se déplaçait à pied. Et il a inventé ça. Cette pointe a résolu son problème mais elle nous a laissé avec une drôle d’énigme à résoudre.
Le problème auquel étaient confrontés les archéologues était de savoir pour quelle raison l’Homme de Folsom creusait les deux faces de ses pointes de sagaie en leur arrachant des fragments en forme de rigoles, et pourquoi il prenait la peine supplémentaire de les affubler à la base de saillies ressemblant à des oreilles. Ces caractéristiques rendaient la pointe bien plus difficile à fabriquer. Elles entraînaient par la même occasion un effet que le bon sens commandait au chasseur d’éviter.
A cause de leur taille (trop petite pour une lance) et étant donné que les pointes étaient souvent retrouvées brisées à la suite d’impacts terribles, les anthropologues étaient sûrs que les pointes avaient été conçues pour un projectile qu’on lançait avec la main mais propulsé par un atlatl, dispositif de soixante centimètres de long qu’utilisent encore les aborigènes australiens: muni d’une encoche à une extrémité pour insérer la base du projectile, et de lanières pour les doigts à l’autre extrémité, l’atlatl a pour fonction d’allonger le bras du chasseur en lui conférant une augmentation considérable de la puissance de jet.
- Il n’y a pas de doute sur la façon dont il propulsait sa sagaie dans le corps du bison, ni sur la raison pour laquelle il n’avait pas besoin de viser les points sensibles de l’animal, commenta Dawson. Mais ce qui se passait ensuite constitue une jolie petite énigme.
Les saillies qui dépassaient à la base de la pointe devaient forcément se retrouver coincées dans la chair de l’animal et, grâce aux gorges, il devait être plus facile de libérer le manche de la pointe lorsqu’on abandonnait celle-ci dans le corps de la victime.
- On pourrait penser que le chasseur désirait retirer la hampe de sa sagaie avec la pointe toujours fixée dessus de façon à pouvoir la réutiliser sans être contraint de fabriquer une nouvelle pointe.
En raison de leur impact moins violent et de leur utilisation différente, les flèches inventées ultérieurement étaient généralement conçues pour rester plantées dans le corps de telle sorte qu’elle puisse s’enfoncer d’avantage et finir par tuer. Mais non pour les sagaies qui atteignaient leur but avec une grande violence.
- Et pourtant, il devait bien le faire à dessein. Il laissait les pointes de Folsom dans le corps de l’animal alors qu’il le découpait en morceaux, même lorsqu’il aurait pu les retirer rien qu’en tendant le bras et en s’en saisissant. Pour quelle raison?
- Nous pensons qu’il pouvait s’agir d’une sorte d’échange. Il donnait à l’animal, qui le nourrissait, cette pointe merveilleusement travaillée en échange de sa viande. Nous ne pouvons en apporter la preuve, mais rien d’autre n’a de sens.
Aujourd’hui les anthropologues savent que l’Homme de Folsom n’était ni le premier ni le dernier représentant de peuples qui vivaient de la chasse en Amérique à l’ère glaciaire. Quand les immenses calottes glaciaires s’accumulèrent sur l’hémisphère nord, le niveau des mers en s’abaissant révéla un pont de terre à travers le détroit de Béring. Les mastodontes, mammouths, et autres espèces de ruminants arrivèrent de Sibérie. L’homme les suivit, il y a probablement trente mille ans environ.
- Il est évident qu’il travaillait beaucoup plus à ces pointes qu’il n’était nécessaire pour tuer un animal, reconnut Dawson.
Il repéra un racloir dès le moment où il tomba sur le treillis. C’était un lourd fragment de quartzite qui avait environ deux fois la taille d’un dollar en argent, et qu’il identifia comme étant un “racloir à nez aplati”. Il reconnut avoir été dérouté par l’absence de bons matériaux de fabrication de racloirs sur la crête, là où il avait trouvé les bases de pointes et les éclats de dégrossissage de taille supérieure, puisque le nettoyage des peaux et la fabrication de nouvelles pointes devaient être des occupations obligatoires dans un camp de chasseurs.
Lorsque l’été toucha à sa fin, un message en provenance de Dawson me laissa entendre qu’il y avait du nouveau.
- A votre avis, qu’est-ce qui a causé ça? m’interrogea-t-il.
Devant nous, la terre avait une couleur légèrement différente et elle était un peu enfoncée, dessinant, tout comme la terre dont la teinte était plus sombre, un ovale qui avait peut-être deux mètres cinquante de long. La seule explication raisonnable qui me vint à l’esprit, était que cet endroit avait été le sol d’une tente où des gens avaient mangé salement.
- C’est la seule explication que je puisse trouver, me confirma Dawson. Et si nous avions raison, nous contemplons le premier signe jamais découvert indiquant que l’Homme de Folsom vivait sous un abri. Il y en a un deuxième juste là.
Dawson et moi progressions sur le versant de la colline de façon à dominer l’autre extrémité de la dépression herbeuse qui était peut-être, il y avait des milliers d’années de cela, un lac marécageux sans profondeur.
- L’eau, m’exposa Dawson, devait attirer les troupeaux de bisons en ce lieu au cours de leurs déplacements qui les conduisaient, selon la saison, vers le nord ou le sud en suivant la vallée du Rio Grande.
L’Homme de Folsom était forcément un individu exceptionnel, tant physiquement qu’intellectuellement. Pour chasser les animaux qu’il poursuivait à pied, il lui fallait être vif, agile et supérieurement intelligent. Ceux qui ne l’étaient pas ne pouvaient survivre et, par conséquent, il avait des générations de sélection naturelle qui travaillaient pour lui. Néanmoins, nous savons qu’un jour l’Homme de Folsom a cessé d’exister. Il s’est passé quelque chose. Nous ignorons quoi et je pense que nous ne devrions pas l’ignorer. Je crois qu’il est important de savoir tout ce que nous pouvons sur l’homme. Or, pendant la plus grande partie du million d’années environ qu’il a passé sur terre, il a été chasseur, comme Folsom.
Le géologue nous signala qu’autrefois le dégorgeoir de la dépression avait été plus haut, suffisamment pour retenir les eaux d’un lac conséquent bien que peu profond.
Dawson retourna à sa pelle avec, me sembla-t-il, un immense plaisir.

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